Jurisprudence | 22 juin 2018 | Par François Oillic

Clause de médiation préalable obligatoire dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs

Dans un arrêt du 16 mai 2018, la Cour de cassation a jugé, au visa des articles L. 212-1 et R. 132-2, 10° du code de la consommation, qu’une clause qui contraint le consommateur, en cas de litige, à recourir obligatoirement à une médiation avant la saisine du juge, est présumée abusive, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire (Cass. civ. 1, 16 mai 2018, n°17-16.197).

L’article R. 132-2, 10 ° du code de la consommation dispose :

« Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont présumées abusives au sens des dispositions des premier et cinquième alinéas de l’article L. 212-1, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire, les clauses ayant pour objet ou pour effet de :
(…)
10° Supprimer ou entraver l’exercice d’actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d’arbitrage non couverte par des dispositions légales ou à passer exclusivement par un mode alternatif de règlement des litiges. »

Cette décision, prise au vu d’un contrat conclu en 2014, qui surprend car la clause de médiation préalable obligatoire n’a pas pour objet de supprimer ou d’entraver l’exercice d’actions en justice et n’oblige pas le consommateur à passer exclusivement par ce processus, ne devrait pas faire florès. L’ordonnance n°2015-1033 du 20 août 2015 transposant la directive 2013/11/UE du Parlement européen et du Conseil en date du 21 mai 2013 sur le règlement extrajudiciaire des litiges de consommation a en effet créé un article L. 152-4 (devenu L. 612-4) au sein du code de la consommation disposant : « Est interdite toute clause ou convention obligeant le consommateur, en cas de litige, à recourir obligatoirement à une médiation préalablement à la saisine du juge. »

Ce type de clause est donc formellement prohibé aujourd’hui.

Il n’en demeure pas moins que l’article L. 612-4 du code de la consommation va à l’encontre du mouvement actuel de promotion du processus de médiation. Ainsi, et notamment, l’article 56 du code de procédure civile dispose-t-il que « sauf justification d’un motif légitime tenant à l’urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu’elle intéresse l’ordre public, l’assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige. »

Ce qui étonne, c’est donc la prohibition de telles clauses par l’article L. 612-4 du code de la consommation, car elles ne privent absolument pas le consommateur du recours au juge in fine, si la médiation échoue. Le droit d’accès au juge est préservé : l’article 2238 du code civil dispose en ce sens que « la prescription est suspendue à compter du jour où, après la survenance d’un litige, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation ou, à défaut d’accord écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation ou de conciliation. »

Il conviendrait donc d’abroger l’article L. 612-4 et l’article R. 212-2, 10 °du code de la consommation.