Jurisprudence | 30 avril 2020 | Par François Oillic

Et si vous tentiez une médiation pour résoudre un différend ?

Nous allons bientôt entrer dans une phase de déconfinement.

Les différends, les conflits, qui ont été mis entre parenthèses, voire ceux qui ont émergé, pendant la période de confinement, deviendront peut-être une priorité. 

Un différend doit en effet être géré le plus tôt possible, pour ne pas dégénérer en combat.

Dans le contexte actuel de quasi cessation d’activité des tribunaux, et futur, de lente et difficile reprise, il n’est pas déraisonnable de penser qu’il convient d’envisager un changement de paradigme, de culture, et de considérer que le recours au juge n’est peut-être pas la meilleure solution. Les délais de jugement seront longs et l’aléa judiciaire toujours présent. L’intelligence artificielle définira par ailleurs et bientôt le profil contentieux des entreprises. Il pourra dès lors être préférable de résoudre amiablement et confidentiellement le litige.

Le moment est venu de considérer que la médiation est peut-être la solution alternative au recours au juge.

Bien conduite, par des professionnels formés, la médiation offre plusieurs atouts :

– recherche d’un dialogue respectueux des personnes, de leurs légitimes motivations, besoins et intérêts, fondé, osons le dire, sur le triptyque de la liberté, de l’égalité, et de la fraternité que la crise sanitaire actuelle pourrait raviver ;

– réappropriation du différend par les parties elles-mêmes, qui exercent pleinement et en responsabilité, leur liberté ;

– souplesse du processus ;

– confidentialité ;

– rapidité ;

– absence d’aléa et réduction du risque d’inexécution d’une décision de justice puisque ce sont les parties elles-mêmes qui décident en toute connaissance de cause des modalités de résolution de leur litige.

M. Gilles LE GENDRE, Président du groupe La République en Marche s’exprimait ainsi à la tribune de l’Assemblée nationale le 28 avril dernier :

 «  (…) : aujourd’hui plus que jamais, alors que des dizaines de millions de Français sont confinés, nous mesurons la valeur inestimable du lien humain et notre besoin de faire société.

Depuis deux mois, les solidarités, grandes ou petites, spectaculaires ou discrètes, organisées ou spontanées, réveillent un capital de générosité, une capacité de résilience, un désir de sens dans notre pays. Ceux-ci ont toujours existé, mais la course effrénée de l’existence et la croyance à un progrès éternel nous privaient trop souvent de les exprimer avec toute leur force. La course brutalement stoppée et le progrès gravement mis en doute, nous voici contraints de revisiter l’essentiel : les conditions de notre survie et les valeurs qui nous unissent.»

Bien conduite, la médiation peut susciter une négociation, non plus sur des positions, mais sur des besoins, et aboutir à un accord, que les dispositions d’ordre public encadrent toutefois davantage en droit administratif qu’en droit privé.

Elle n’est pas pour autant la panacée.

Elle suppose en effet que les parties soient de bonne foi.

Elle n’est pas non plus nécessairement indiquée lorsque les parties n’envisagent absolument pas de poursuive leur relation, ne partagent absolument pas ensemble les valeurs de bienveillance, de collaboration, d’humanité, ou ne veulent absolument pas se donner le temps de connaître l’autre (dans cette hypothèse, un recours à la conciliation, voire à une négociation sur position peut toutefois être envisagée), ou encore lorsque le conflit repose exclusivement sur l’interprétation différente d’un texte ou ne présente aucun aléa judiciaire pour une partie (dans cette hypothèse, une décision de justice s’impose).

Le conflit est inhérent à la nature humaine. Ce n’est pas une tare. Mais le résoudre par la force ou l’ignorer, est de nature à créer des difficultés.

Coopérer, de bonne foi, permet assurément de grandir en humanité.